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Paroles d'une petite fille
Ludovique est la cadette du club.
C'est une jeune fille étonnante. Elle a demandé à "délirer
sur Véronique" dans le journal. Et comme par enchantement, 4 pages
vierges se sont offertes à elle, se laissant envahir par sa démente prose...
Je ne suis qu'une petite fille,
Ludovique, de 14 ans, habitant à Nancy et j'ai eu l'occasion de vivre, comme
Olivier Steffen, quelques temps en compagnie de Véronique.
Mes réactions à ces moments-là vous paraîtront peut-être un peu enfantines mais
sûrement très sincères. Tout d'abord, revenons trois années en arrière lors de ma première découverte
de ce que les journaux à sensation appellent le "phénomène SANSON".
C'était le 22 juillet 77. Mes cousins niçois acceptèrent de ma faire
assister au spectacle de Véronique pour donner un fond musical à mes vacances
malgré son jeune age (11 ans à l'époque !). Depuis ce jour, ce ne fut
qu'une succession d'expériences passionnantes dans tous les domaines. Je
suis entrée presque indifférente dans cette salle de concerts en plein air
qu'est le "Théâtre de Verdure". J'en suis sortie l'esprit
métamorphosé. C'est à ce moment précis que beaucoup de choses changèrent et devinrent la
cause de mes préoccupations actuelles. En effet, j'avais été frappée
par la richesse d'harmonies que comporte chacune de ses chansons mais aussi
par sa voix aussi bien orageuse et passionnée que nostalgique et pleine de
tristesse. Le disque de Véronique qui inaugura ma collection fut
d'ailleurs "Le Maudit". C'était et c'est encore à la fois un véritable
plaisir de l'écouter mais aussi une sorte de petit pincement au coeur que vous
avez tous dû ressentir si vous aimez vraiment Véronique. En attendant
son prochain spectacle, j'essayais de me procurer les anciens disques sortis
depuis "Amoureuse".
En classe, mes camarades me reniaient
dès que je leur parlais de Véro car il leur semblait "anormal" que
j'apprécie une chanteuse à leurs yeux inconnues et inaccessibles. Ils
auraient peut-être préféré que je porte plus d'attention au dernier
"tube" de Casimir ou Hippolyte!
Quelques mois plus tard, le 20 mai 78,
je réussis à convaincre ma famille de m'accompagner à Metz pour le nouveau
spectacle de Véro (Metz est à environ 3/4 d'heure de Nancy).
Dès qu'elle fit son apparition, je me
mis à trembler nerveusement, ce qui fit sourire mon professeur de gymnastique
qui, paraît-il, était assis derrière moi (ce que je n'avais pas remarqué de
toute la soirée). Impossible de fixer un flash sur mon instamatic, j'étais
paniquée, je transpirais et mon coeur battait très fort pour la première fois.
Je restée collée contre la scène, un jeune garde du corps indulgent m'avait
autorisée à rester debout, ma petite taille ne gênant personne.
À l'entracte, je pris l'initiative d'essayer de pénétrer dans les
"coulisses sacrées". On me prévint que si je me faisais mettre
dehors à coups de pieds aux fesses, il ne fallait pas venir me plaindre. Il fallait se risquer... alors, hardiment, j'entrai dans ce couloir qui menait
à la grotte d'Ali Babette. Seulement voilà, je ne connaissais pas la
formule magique. Dieu merci, la porte était ouverte et je pouvais voir
"Véronique se recoiffant. J'étais tout de même intimidée. J'avais préparé toutes sortes de questions à son intention, malheureusement,
l'émotion me fit perdre la parole ! L'échange fut rapide: "tu
viens me voir à la fin, O.K. ?" me dit Véro l'air amusé, sans doute
parce qu'elle n'avait pas l'habitude de rencontrer une gamine de 12 ans au cours
de ses concerts. J'étais émerveillée; j'approuvai d'un hochement de tête
suivi d'un sourire débordant d'admiration. Je repartis en trombe dans la
salle et le spectacle continua. Près de moi, un jeune homme surexcité ne
cessait de remuer et de crier. Soudain, Véronique en eut assez. Elle lui lança un de ces jurons américains qui gronda comme le tonnerre et fit
régner un silence surprenant dans la salle. Le garçon, enchanté que Véro
lui adresse la parole, dit : "Non, pas la peine de s'énerver, je voulais
juste un échange, c'est tout". Le public applaudit, Véro sourit
puis enchaîna sur une autre chanson.
Quelques minutes avant la fin, voyant
les gardes du corps faire une barrière autour de la scène, je fus prise de
panique. Impossible de passer. Pourtant, je voulais absolument la
revoir plus longuement afin de savoir "ce qu'elle avait dans le ventre".
La foule était déchainée et tout le monde debout. Je ne voyais à présent
que des bras s'agiter. J'avais peur d'être écrasée par cette masse humaine. Alors je décidai de retrouver ce jeune homme qui m'avait fait
passer à l'entracte. Immédiatement il me confia à une équipe de
journalistes qui était censée interviewer Véronique après le spectacle.
Évidemment, le rappel fut effréné et le public fit une fois de plus une
ovation à notre petit trésor qui ce soir-là "dégagea" un maximum
de son energie dans "Bernard's Song" et "Y a pas de doute".
À
propos, j'aimerais glisser quelques
mots sur l'album "Hollywood" qui m'a un peu déçue car je voyais déjà
Véronique s'éloigner d'elle-même par ces chansons électriques sans trop de
sincérité (excepté "Féminin" et "How many lies"). Mais, ce n'était qu'une idée toute faite puisque le "7ème" nous a
prouvé qu'elle sait évoluer sans suivre les modes, en gardant sa manière de
chanter et de composer dans son propre style. Chose bien rare à notre époque
dans la chanson française.
Donc, je me suis retrouvée au milieu
d'une équipe de journalistes dont l'un entre eux me fait connaître actuellement
les différentes facettes de son métier qui me passionne. Nous dûmes
attendre que Véronique ait savouré ses quelques minutes de répit après
le spectacle (cela dura près d'une demi-heure ce jour-là). Bernard
Saint-Paul sortit de la loge et rappela à voix haute que seuls les journalistes
pouvaient entrer pour le moment. Ayant pris le soin de sympathiser avec
l'un d'entre eux, on me fit passer pour une assistante. Bernard parut étonné
mais ne me refoula pas. Véronique, vêtue d'un jean et d'un teeshirt bleu
marine marqué "Véro", était assise devant une table où trônaient
une bouteille de vin, une d'eau et un verre à pied. Elle avait rangé son
petit matériel et était prête à affronter les journalistes, ses lunettes sur
le bout de son nez. Quand elle me vit, elle sourit. La discussion s'engagea. Je restais immobile à la
regarder. Elle s'exprimait
beaucoup avec ses mains qui décrivaient toutes sortes de gestes dans les airs. Elle se levait, se servait à boire, allumait une cigarette, se rasseyait et me
regardait de temps en temps avec ses yeux fatigués, marqués de fines petites
rides. Cet entretien se termina au milieu d'admirateurs bruyants qui lui réclamaient
des autographes. Pour vous montrer jusqu'où allait sa fatigue: Plato T.
Jones lui présenta une feuille de papier. Elle la prit et signa
machinalement sans trop savoir à qui elle était destinée. Quand elle
s'en rendit compte, elle ne put s'empêcher de soupirer... Je sortis de la loge
toute bouleversée. Je remerciai les journalistes puis je repartis à 1h
du matin vers Nancy. |
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