Harmonies

(Number 8 Part 9)


  . Véro sur Radio 7 (Interview ...suite)

Q)  Puisqu'on parle de la composition des chansons, j'aimerai savoir si tu sais tout de suite, quand tu en écris une, si elle sera bonne ou bien si ce n'est pas finalement le lendemain matin qu'on se dit si elle est bonne ou pas ?

Véro)  Sur le coup, on les aime tout de suite, surtout quand on n'a rien fait depuis longtemps et puis, on en fait plein comme ça et quelquefois, le lendemain, on les réécoute, on se dit "mais non, ce n'est pas bien du tout" et puis, finalement, c'est quand même une habitude, une gymnastique, il faut travailler.

Q)  As-tu l'impression de toujours exploiter la même partie du piano, au moins quand tu composes ?

Véro) (hésitante) ça dépend, si je reste très longtemps au piano, j'arrive à faire des choses très différentes de ce que je fais normalement simplement parce que je me trompe d'accord et que je trouve que cet accord est bien. Autrement, je reste tout de même dans le même style parce que je sais que j'ai un style à moi et c'est difficile d'en sortir.

Q)  Et c'est peut-être pas naturel d'en sortir...

Véro)  Je n'essaye jamais d'en sortir parce qu'à ce moment-là, je pense que ce que je fais est voulu et compliqué et pas beau mais je sais que tout le monde évolue - moi aussi - ne serait-ce que parce qu'on entend tous les jours de la musique qui évolue - surtout en France - et quelquefois, j'arrive à faire des trucs qui m'étonnent moi-même.

Q)  Tu as l'impression que ça t'est donné ? - je me rappelle Polnareff qui disait un jour qu'il a écrit "Ame cāline" parce qu'il était assis sur un lit au Maroc et qu'il a entendu un oiseau chanter et cet oiseau chantait les 3 premières notes d'"āme cāline", il s'est levé, il s'est mis au piano, et il a dit "quelqu'un me l'a attribué, ce n'est pas moi cette chanson, on me l'a donnée".

Véro)  C'est marrant; ce qui m'arrive quelquefois, c'est de rêver de musiques, je me lève et je vais les essayer au piano. C'est rare mais ça m'est arrivé. Et je fais beaucoup de trucs dans la voiture aussi (rires) la voiture, c'est génial pour ça.

["Redoutable" live '76. Émotion intense. Un sale goût de larmes dans son fou rire].

Q)  As-tu toujours l'impression d'être une touriste à Paris ?

Véro)  (catégorique) Ah pas du tout, alors. Paris, c'est ma ville. Tu rigoles...

Q)  Mais tu avais écris ça, une fois "feeling like a tourist in my own home-town"...

Véro)  (réfléchissant)  Oui, c'est dans "Full tilt frog". C'est parce qu'à l'époque, je ne venais simplement pour travailler, pour faire des tournées. Je venais assez rarement et il y avait des noms de la rue où je suis née, dans mon dos ! - c'est pour cela que j'ai écrit cette phrase. Je me sens un peu exilée quand même. Quand je reviens après une longue absence, je mets au moins une semaine à m'adapter à Paris, aux gens qui sont plutôt assez agressifs comparés aux gens de la Californie où il fait toujours beau, qui ont toujours le sourire. Ą Paris, ça va à toute vitesse, c'est plutôt comme New-York, les gens n'ont le temps de rien faire.

Q)  Tu n'as pas l'impression d'être quelqu'un qui n'a plutôt pas empêché le public de connaître sa vie privée ?  Je veux dire que tu ne l'as pas exposée, mais tu ne l'as pas non plus trop protégée. Est-ce que c'est parce que c'était obligatoire parce que ça se retrouvait dans tes chansons ou parce que tu estimais que quand on est public, on est public ?

Véro)  Je crois que c'est les deux parce que dans mes chansons, il y avait beaucoup de choses de ma vie privée mais, il n'y a quand même pas toute ma vie privée - heureusement (rires) - mais ça ne me dérange pas de dire les choses comme elles sont, le superficiel en tout cas, mais je crois que je ne l'ai pas trop révélée quand même. De toute façon, les gens savent tout. On se demande comment ils font, mais ils savent tout.

Q)  Donc, autant donner l'information soi-même...

Véro)  Oui, exactement.

Q)  Ton fils, quand même, tu le protèges plus que le reste...

Véro)  Mon fils, je n'ai même pas à le protéger, je crois que tout ça se fait très naturellement. Quand on me demande des nouvelles de mon fils, je donne des nouvelles de mon fils, quand on ne m'en demande pas, je n'en donne pas.

Q)  Mais, tu n'as pas eu, par exemple, une nuée de photographes qui voulait absolument le prendre en photo tout le temps ?

Véro)  (réfléchissant)  Si, il y a une époque où je ne voulais pas trop, alors j'en ai fait très peu, parce que (tendre) j'aimais bien protéger un peu ça.

Q)  Comment se fait-il que ce soit ta maman qui s'occupe de management ?

Véro)  Elle ne s'occupe pas du tout du management, elle s'occupe du côté financier de "l'affaire". Je suis très étonné qu'il y ait des coups de téléphone qui arrivent chez elle pour demander si je peux faire telle télévision, telle radio. C'est très curieux. Elle me dit des fois : "tu sais quoi ? j'ai reçu un coup de téléphone, il faut absolument que tu rappelles" et elle est très étonné aussi.

[ "Toute une vie sans te voir" live Palais des Sports '81. Moment d'intimité. L'émotion dans la voix. Impression d'une implacable lucidité]

Q)  As-tu l'impression quand tu réécoutes tes premiers albums, que ta voix a changé?

Véro)  Oui, je crois qu'elle a changé, qu'elle s'est plus approfondie. Quand j'écoute mon premier album, j'ai l'impression d'avoir une toute petite voix et quand j'écoute les disques que j'ai fait avant chez Pathé-Marconi, je ne le crois pas !  J'avais une toute petite voix. Je ne sais pas si c'est parce que je fume plus qu'avant ou si c'est parce que je vieillis... elle est plus gutturale.

Q)  Est-ce que c'est une règle pour toi de faire toujours des chansons seule au piano, n'as-tu pas envie de faire comme le font des fois Randy Newman ou Elton John, un concert entier sans musiciens ?

Véro)  J'y ai pensé parce qu'on me l'a toujours dit et je me dis que ça me barberait.

Q)  En tant que spectatrice ?

Véro)  Oui, absolument. Même Randy Newman - c'est mon idole, je trouve que c'est un merveilleux musicien, eh bien, tout un concert au piano, ça me barbe. Alors qu'il écrit tellement bien les cordes, son groupe est tellement bon que j'ai envie d'écouter tout ça. Il y a des chansons qu'on peut se permettre de faire seule au piano, et encore pas trop. J'en fait 5 ou 6 à la grande limite. Après, je trouve que c'est trop, j'ai peur d'ennuyer les gens. Par contre, ça me m'ennuye jamais de les faire. Je me mets à la place du public et je me dis que ça va les barber (rires)... qu'ils vont s'endormir sur leurs fauteuils.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Revised: July 01, 2002.